Invitation à la table des PRD : Préparer des clients à une médiation
Par Harold Tan, LL.M, Méd.B., CC.Med. et Shaaron Jones-Crawford, Méd.A.
Préparer des clients aux PRD, comme la médiation, présente de nombreuses similitudes avec un événement important. Pour beaucoup, ce sera leur première médiation. Ils auront des questions, des préoccupations, des attentes et des craintes.
Les auteurs ont choisi la métaphore de l’Hôte pour illustrer le rôle du Médiateur, les deux fonctions nécessitant de la planification, un sens aigu du détail et de la créativité.
« La nourriture est notre point commun, une expérience universelle. » (chef/auteur James Beard)
Introduction
La porte s’ouvre sur une pièce d’où s’échappe la mélodie d’un Ney turc. Une odeur d’oranges de Séville embaume l’air. Sur une table sont disposés des pivoines blanches, des verres à pied fins et des assiettes en porcelaine bleue et blanche. Votre nom est calligraphié sur un marque-place. « Bienvenue! », s’exclame l’hôte. Voici la table des PRD.
Préparer des clients aux PRD, comme la médiation, présente de nombreuses similitudes avec un événement important. Pour beaucoup, ce sera leur première médiation. Ils auront des questions, des préoccupations, des attentes et des craintes.
Les auteurs ont choisi la métaphore de l’Hôte pour illustrer le rôle du Médiateur, les deux fonctions nécessitant de la planification, un sens aigu du détail et de la créativité.Invitation et confirmation de présence
Les assiettes, les couverts et les serviettes sont ce que l’on voit en premier d’une table gastronomique. De même, le Médiateur tient habituellement compte de divers éléments, notamment les problèmes importants, la date et le lieu.
Un bon Hôte fait preuve d’hospitalité et tient compte de la diversité culturelle, religieuse et alimentaire. Le Médiateur crée sciemment un environnement accueillant et invitant.
L’invitation aux PRD inclut des renseignements préliminaires sur le processus, les rôles et responsabilités, et une demande de confirmation de présence qui permet au client d’y participer rapidement. Le Médiateur utilise la demande de confirmation de présence pour vérifier le temps de réponse, le ton, les éventuelles objections, etc., du client. Ces renseignements peuvent être utiles pour le souper de répétition.
Souper de répétition (« médiation préalable »)
Durant la médiation préalable, les clients reçoivent un « avant-goût » du processus à venir par l’entremise de leurs interactions avec le Médiateur. En même temps, ce dernier peut observer directement les styles personnels et réunir des renseignements essentiels sur la manière dont les clients présentent leurs problèmes et communiquent. Cette rencontre lui offre également l’occasion d’évaluer si un soutien supplémentaire, comme un encadrement en gestion des conflits, un interprète, etc., peut être nécessaire avant une séance conjointe.
Le client qui accepte avec enthousiasme de nouvelles expériences, comme les oursins et les pitayas, est souvent plus susceptible d’avoir envie d’acquérir des compétences, telles que les déclarations à la première personne et la reformulation. La répétition prépare le client, l’aide à vaincre ses peurs et stimule sa confiance.
La médiation préalable est aussi une plateforme qui permettra au Médiateur de démontrer sa compétence et son autorité. Un souper de répétition bien organisé tient compte de chaque détail et assure aux invités que la table des PRD leur sera bénéfique. Les invités sachant déjà quels couverts utiliser pour chaque plat seront pleinement à l’aise pour participer.
Le jour J (« médiation »)
Avant que la médiation commence officiellement, de nombreuses occasions s’offrent au Médiateur de créer le bon état d’esprit et d’obtenir de précieux renseignements. Les arrivées progressives lui permettent de communiquer séparément avec chaque client et d’échanger sur des sujets neutres, tels que films, livres ou jardinage. Ce « bavardage » peut réduire la tension dans la salle en donnant à chaque client une place pour participer. Un client peut raconter la fois où il a mangé des dim sum; l’autre peut recommander un restaurant de poulet à la Jamaïcaine. Le bavardage crée des liens avant que tout le monde s’attèle à la tâche qui nous occupe.
Le Médiateur réunit les renseignements en observant de façon stratégique la réaction des clients.
Une fois assis, son mot d’ouverture inclut habituellement l’ordre du jour, les lignes directrices de civilité, de l’information administrative, etc. Cela lui permet de mettre l’accent sur le caractère du moment en réitérant les avantages du processus qu’ils sont sur le point d’entamer.
Après son mot d’ouverture, le Médiateur invite les clients à participer en prenant la parole et en écoutant dans un ordre prédéfini. Comme une bouillabaisse infusée au safran servie dans une même soupière, les clients reconnaissent qu’ils participent à une expérience commune en partageant le même mets pour la première fois dans un plat commun.
À mesure que se déroule la médiation, les conversations peuvent aller dans une direction ou une autre. Les clients décideront de ce qu’ils veulent dire et les palais commenceront à se distinguer. L’un pourra choisir un kebab à l’agneau, et l’autre pourra préférer les tortillas de maïs noir. En offrant un menu qui embrasse et respecte la diversité, le Médiateur incite au respect des différences de goûts et établit un ton positif pour le processus.
Tout comme un hôte veille à ce que les verres soient toujours pleins de prosecco ou de bière de gingembre, le Médiateur soigne l’accueil, à la gestion du temps et contrôle les pauses établies.
Il observe les changements de ton : qu’il s’agisse d’un langage moins accusatoire, d’excuses imprévues ou d’un rire sincère. Ces signes peuvent indiquer si les clients sont prêts à passer du dialogue au règlement. C’est le dessert du client et la « récompense » pour le travail et les efforts investis.
Séparation (« règlement »)
Avant de servir le dessert, on débarrasse la table. On vide les assiettes. Les invités savent que quelque chose de différent va arriver. Avant que les clients passent au règlement, le Médiateur souligne cette transition en mettant en avant les progrès réalisés et reconnaît qu’il y a eu un changement. On a peut-être trouvé un terrain d’entente pour les désaccords; l’humeur est plus optimiste. Le Médiateur affirme que les clients sont sur le point d’atteindre leurs objectifs et leur demande s’ils sont prêts à passer au règlement.
Une fois au dessert, les invités reconnaissent qu’il existe différents palais. L’un peut opter pour le gâteau aux cerises et à la pâte d’amandes alors qu’un autre peut choisir du Stilton, du Manchego ou du chèvre. Le fait que salé et sucré puissent coexister est la zone d’entente potentielle, et permet au Médiateur de négocier un terrain d’entente. Ici, il met en avant les progrès réalisés en ce qui concerne la réduction des dommages réputationnels, les frais juridiques, les problèmes de confidentialité et les avantages à parvenir à un règlement aujourd’hui. Le Médiateur présente méticuleusement ce qui importe à chaque client et veille à ce que la zone d’entente potentielle couvre une partie de ces exigences.
Conclusion
L’entente de règlement a été conclue et les clients sont prêts à partir. Tout comme les invités à un souper prennent des photos pour immortaliser leur expérience, le Médiateur invite les clients à prendre leur entente signée.
Le Médiateur observe les soupirs de soulagement et les conversations spontanées qui naissent entre des clients au sujet de nouvelles recommandations de camions de cuisine de rue. Tout peut indiquer de futures possibilités entre les clients.
Le Médiateur remercie chaque client lorsqu’il s’en va et l’encourage à souligner la réalisation du jour en se faisant plaisir : peut-être un nouveau restaurant qui sert du crabe piquant Singapourien.
Pour les clients, l’expérience dînatoire se poursuit.
« Je regarde la cuisine changer le cuisinier tout comme elle transforme les aliments. » (Laura Esquivel, auteure de Like Water for Chocolate)
Harold Tan est médiateur, enquêteur, arbitre, auteur, professeur au Humber College (Longo School of Business) et encadrant à l’Université de York (éducation permanente). Il est titulaire d’un LL. M. (règlement extrajudiciaire des différends) de la Osgoode Law School, d’un titre de médiateur breveté (Méd.B) de l’ADR Institute of Ontario/l’IAMC et de médiateur communautaire agréé (CC. Med.) de l’Ontario Community Mediation Coalition.
Il est titulaire d’un Advanced Certificate in Peacemaking Circles, et a suivi une formation en justice réparatrice (ministère du Procureur général de l’Ontario). Par ailleurs, il est titulaire d’un Certificate en Advanced Adjudication (Osgoode Law).
Shaaron Jones-Crawford est une avocate de formation internationale qui possède de l’expérience en médiation, en arbitrage, en règlement extrajudiciaire des différends et en formation en la matière. Elle est titulaire d’un LL. B. et d’un LL. M., a été admise au barreau d’Angleterre et du Pays de Galles et est membre de l’Honorable Society of Lincoln‘s Inn à Londres, Angleterre. Elle détient un titre de médiatrice agréée (Méd.A) de l’ADR Institute of Ontario/l’IAMC.
Shaaron détient un Executive Certificate of Conflict Management (EC.CM) délivré par la Windsor Law School, et est aussi titulaire d’un Certificate en Advanced Adjudication (Osgoode Law School).
Elle est titulaire d’une licence d’avocate dans les Caraïbes, ce qui lui permet d’exercer dans plusieurs territoires caribéens. Shaaron exerce surtout dans les domaines de PRD des litiges commerciaux et d’entreprise.