Les arguments en faveur du médiateur organisationnel – notre organisation dispose de ressources humaines, pourquoi aurions-nous besoin d’un médiateur organisationnel?
Par Jennifer Ansell
Un médiateur organisationnel efficace effectue un travail très différent, mais complémentaire de celui des services juridiques et des ressources humaines de l’organisation. Il établit un mécanisme de plainte important, rentable, confidentiel et impartial pour les parties prenantes et le personnel de l’entreprise.
Les organisations de taille moyenne et de grande taille devraient disposer des services d’un médiateur organisationnel chargé de promouvoir une culture d’entreprise saine et inclusive en mettant l’accent sur la prévention des conflits, la désescalade des conflits, les enquêtes sur le lieu de travail et la résolution des plaintes.
Le médiateur travaille en parallèle, en consultation et en soutien des services des ressources humaines et des services juridiques d’une organisation. Il aide les organisations, et plus particulièrement leurs services juridiques et de ressources humaines, en enquêtant et en répondant aux plaintes et en évitant que les conflits ne s’aggravent. Il contribue à réduire le nombre de conflits sur le lieu de travail en détectant d’éventuelles lacunes ou de possibles problèmes systémiques au sein de l’organisation, en s’attaquant aux « braises » qui peuvent brûler dans l’organisation (comme le racisme systématique ou le leadership toxique) et en étant l’organe chargé d’enquêter sur les plaintes.
Directives et mandats du médiateur organisationnel efficace
Le rôle du médiateur est multidisciplinaire et de nature à la fois proactive et réactive. Le médiateur traite et examine les plaintes interpersonnelles et plus systémiques, ainsi que les problèmes qui se posent à l’échelle de l’organisation.
Agissant de manière proactive, le médiateur enquête souvent auprès du personnel (et de la direction) afin de cerner les problèmes sous-jacents, de compiler des données et d’analyser les tendances en matière de plaintes. Il travaille à la réalisation des objectifs stratégiques de l’organisation et évalue la situation de son organisation par rapport à d’autres semblables.
Le médiateur peut utiliser les données qu’il a recueillies auprès du personnel de l’entreprise, en conjonction avec les tendances plus générales du marché du travail dans la province et le pays, pour créer des possibilités de formation et de développement professionnel personnalisées qui nécessitent souvent les connaissances spécialisées (souvent juridiques) que le médiateur apporte à sa fonction. Il peut élaborer et dispenser une formation importante et adaptée sur des sujets comme la mise à jour des approches actuelles de l’organisation sur des questions importantes, notamment le harcèlement sexuel sur le lieu de travail ou la sensibilité culturelle à l’égard des groupes minoritaires.
Le médiateur, sensible aux conflits, fournit à l’organisation un mécanisme structuré de réception des plaintes officielles, des services de règlement rapide, des services de facilitation de la réparation sur le lieu de travail, des enquêtes et des rapports exhaustifs sur le lieu de travail, et peut orienter les intéressés vers des services juridiques ou des prestataires externes.
Au niveau de la direction, le médiateur est la personne qui, dans un rapport annuel, rendra compte de la manière dont son bureau a soutenu et soutiendra la vision stratégique de l’entreprise, ainsi que du travail accompli et des tendances observées. Le médiateur mène des initiatives et est en mesure de formuler des recommandations précieuses concernant la culture du lieu de travail, en ce qui concerne les conflits et la sécurité psychologique au travail, par exemple.
La différence entre le médiateur, les ressources humaines et le service juridique
La capacité fonctionnelle unique d’un bureau de médiateur, par rapport à celle d’un service juridique ou des ressources humaines, réside dans l’importance qu’il accorde aux enquêtes indépendantes, impartiales et confidentielles sur les plaintes, ainsi qu’à la résolution rapide et à la prévention des conflits.
Le médiateur, qui n’appartient pas au service juridique ou au service des ressources humaines, peut jouer un rôle confidentiel et indépendant et mener des enquêtes impartiales, sans enquêter sur ses collègues ni créer de conflits d’intérêts, comme cela peut être le cas lorsque le rôle est usurpé par le service des ressources humaines ou le service juridique.
Si une organisation finance son médiateur, comment celui-ci peut-il être perçu comme neutre? Le médiateur ne doit avoir aucune obligation de conseil ou de rapport intérimaire à quelque niveau que ce soit de l’organisation et ne doit rendre compte qu’au plus haut niveau de la direction de l’organisation.
Un médiateur aurait pu aider
En septembre 2020, CTV News a fait état de plaintes à grande échelle déposées par des employés au sujet d’un « lieu de travail toxique » au sein de la ville de Winnipeg. [1] Les plaintes portaient notamment sur le racisme, les brimades et le harcèlement. Dans le reportage, Gord Delibridge, du SCFP 500, le syndicat représentant les employés de la Ville, déclare à CTV que « nous en sommes arrivés à un niveau de frustration tel que la situation n’est pas gérée de manière équitable pour les personnes touchées par ces violations des droits de la personne et ces plaintes sur le lieu de travail ».
Bien que je ne prétende pas connaître de première main les complexités de ce problème particulier, il semblerait qu’une approche plus proactive pour prendre le pouls de ce qui se passait pour et avec les employés aurait pu mettre à jour des problèmes sous-jacents, ou des « braises ardentes », qui auraient pu être traités. Il est vrai que cette affaire est devenue un embarras de relations publiques pour la Ville de Winnipeg, mais surtout, les plaintes font état d’un traitement et d’une culture terribles que les employés ont dû endurer.
La rentabilité d’un médiateur
Le médiateur est un investissement financièrement judicieux pour les organisations, car il leur permet d’économiser d’importantes sommes d’argent et d’obtenir un excellent retour sur investissement par rapport à ce qu’il coûte à l’organisation. Il permet à l’organisation d’économiser de l’argent et d’apporter une valeur ajoutée de trois manières principales.
Enquêtes en milieu de travail. Lorsque des plaintes sont déposées au sujet d’un responsable, d’une politique de l’entreprise ou de la manière dont un ou plusieurs employés sont traités, un médiateur efficace évite d’avoir à engager une société privée d’enquête sur le lieu de travail, ce qui est coûteux. Un médiateur qui reçoit la plainte, mène l’enquête et rédige un rapport d’enquête final, comprenant souvent des recommandations de résolution, évite à l’organisation de dépenser 450 dollars de l’heure, par plainte, en frais d’enquête sur le lieu de travail. [2]
Pour une plainte de harcèlement au travail en Ontario, par exemple, les paragraphes 25(2)(h) et 32.0.7(a) de la Loi sur la santé et la sécurité au travail et le paragraphe 5(2) du Code des droits de la personnede l’Ontario peuvent exiger que la plainte fasse l’objet d’une enquête par un enquêteur impartial.
Frais de contentieux. L’économie réalisée sur les frais d’enquête est une économie importante pour l’entreprise, mais qu’en est-il du travail de résolution précoce effectué par les médiateurs? La facilitation sur le lieu de travail, l’accompagnement dans la gestion des différends, la médiation, la réparation et d’autres formes de résolution précoce qui permettent d’éviter les litiges apportent également une valeur ajoutée aux entreprises. Chaque affaire qu’un médiateur empêche d’aller en justice peut faire économiser à l’organisation de 15 000 à 40 000 dollars en frais de contentieux. [3]
Formation et éducation. Le médiateur peut perfectionner et former de manière proactive le personnel, ou des équipes spécifiques, sur des questions culturelles et juridiques potentielles problématiques en vue d’éviter les conflits interpersonnels. Si elle est assurée par les ressources humaines, la formation peut mettre à rude épreuve les services des ressources humaines, qui peuvent déjà être surchargés et ne pas disposer de l’expertise juridique nécessaire pour mener à bien certains types de formation. La société de formation moyenne qui propose des formations sur les préjugés, par exemple, facture de 2 000 à 6 000 dollars américains par jour, pour des groupes ne dépassant pas 50 personnes. [4]
[1] Union alleges ‘toxic workplace’ for City of Winnipeg employees facing racism, bullying and harassment(11 septembre 2020), en ligne à l’adresse : https://winnipeg.ctvnews.ca/union-alleges-toxic-workplace-for-city-of-winnipeg-employees-facing-racism-bullying-and-harassment-1.5101895[2] Balancing Cost and Risk in Workplace Investigations (consulté le 8 janvier 2023), en ligne à l’adresse : Balancing Cost and Risk in Workplace Investigations (caseiq.com)
[3] Millard & Co., Why Do Most Human Rights Claims Settle? (10 mars 2020), en ligne à l’adresse : <Why do most human rights claims settle? | Millard Legal Professional Corporation o/a Millard & Company (millardco.ca)>.
[4] David Miller, Tech companies spend big money on bias training – but it hasn’t improved diversity numbers (consulté le 9 janvier 2023), en ligne à l’adresse : <Tech companies spend big money on bias training – but it hasn’t improved diversity numbers (theconversation.com)>.
Jennifer R. Ansell est une médiatrice torontoise dans les domaines du droit civil, du droit du travail, des dommages corporels, des droits de la personne et de la médiation communautaire. Elle a suivi une formation d’enquêtrice sur le lieu de travail, est parajuriste agréée, arbitre à l’Administrative Penalty Tribunal de Toronto et professeure, enseignant la formation parajuridique au Humber College et la négociation pour les entreprises dans le cadre du baccalauréat spécialisé en commerce à l’Université de Guelph-Humber. Jennifer a suivi plus de 350 heures de formation spécialisée sur les conflits et a obtenu une maîtrise en droit (LLM) à la Osgoode Hall Law School de l’Université York.