CRITIQUE LITTÉRAIRE

An Anatomy of Everyday Arguments: Conflict and Change through Insight
Marnie Jull
McGill-Queen’s University Press, 2022
ISBN-10 : 022800845X
ISBN-13 : 978-0228008453
Une critique de Demi Peters, Méd.B
Ce livre porte un regard théorique sur ce que l’on appelle « l’approche par la connaissance » au différend. Dans un bref mais dense document introspectif, Jull examine quatre différends distincts à travers ce prisme. Non initiée à cette approche, j’ai trouvé l’écriture très pertinente et instructive, mais j’aurais aimé avoir lu quelques textes rudimentaires sur le sujet avant de lire ce livre; j’ai souvent eu l’impression que la présentation et l’application de l’approche de Jull dépassaient ma compréhension.
Jull commence An Anatomy of Everyday Arguments par une introduction invitant le lecteur qui « préfère les récits à la théorie » à commencer par le quatrième chapitre, avant de revenir aux chapitres précédents, où sont décrits les aspects théoriques et méthodologiques de l’approche par la connaissance. En tant que lectrice qui aime un bon récit, j’ai apprécié cette invitation. Cependant, je n’y ai pas donné suite et j’ai trouvé satisfaisant de parcourir les explications théoriques et méthodologiques, car j’étais complètement ignorante de l’approche par la connaissance.
Au premier chapitre, Jull utilise le terme « autoethnographie » [traduction], un mot nouveau pour moi. L’autoethnographie, explique-t-elle, est la manière dont elle entend transmettre les récits de différends et dont elle applique l’approche par la connaissance. Au chapitre suivant, elle décrit les notions essentielles de l’approche par la connaissance, en indiquant à la page 20 : « L’approche par la connaissance accorde une attention particulière à la prise de décision individuelle en tant que point central de l’attention analytique, reconnaissant que le comportement conflictuel est la représentation d’une décision prise par des individus qui a lieu dans les rôles sociaux que nous présentons (M. Price, 2019; Peddle, 2020). » [traduction] Le chapitre 2 a été extrêmement précieux pour moi, étant donné que je ne savais rien de l’approche par la connaissance avant de lire ce livre.
Que le lecteur accepte l’invitation de Jull et lise d’abord les récits ou qu’il choisisse de lire l’ouvrage du début à la fin, j’encourage tout lecteur à lire, voire à relire, le chapitre 2 de concert avec l’annexe, qui comprend un schéma de la « boucle de la connaissance ». Ces éléments m’ont aidée à comprendre l’analyse théorique de Jull sur les conflits qu’elle décrit, ainsi qu’à comprendre l’approche par la connaissance aux différends.
Le chapitre 3 contient la préface méthodologique de Jull aux cas étudiés dans le livre. Ensuite, dans les quatre chapitres suivants, elle partage les expériences qu’elle a vécues à travers divers différends, en adoptant de multiples points de vue : celui d’une participante au différend, de l’observatrice et de la facilitatrice de règlement des différends. Dans chaque récit, Jull analyse l’expérience du différend et met l’accent sur la façon dont l’approche par la connaissance accroît le potentiel de compréhension entre les parties et offre plus d’occasions de règlement que si les participants étaient restés dans leur propre espace d’indifférence et de valorisation.
Le chapitre 4 décrit un différend interpersonnel entre Jull et son partenaire. Dans cet exemple émouvant, Jull examine le règlement des différends lorsqu’aucun changement de valeurs ni même aucune entente ne se produit. Au lieu de cela, ce qui transpire est une compréhension approfondie de l’autre partie.
Le chapitre 5 décrit le conflit interne de Jull quant à la participation de sa fille à une ligue de hockey compétitive. Dans cet exemple, Jull examine l’horizon en expansion de questions et de considérations possibles, concluant qu’un différend n’est pas nécessairement mauvais, entre autres choses relatives à la situation.
Le chapitre 6 décrit l’interaction de Jull avec une amie au sujet d’un différend vécu par son amie dans son rôle de consultante. Ce qui m’a frappée dans ce chapitre, c’est la réflexion de Jull sur l’« autoréférencement », par rapport à la compréhension « selon ses propres termes » (page 89), et sa détermination selon laquelle ni l’un ni l’autre n’est intrinsèquement bon ni mauvais; chacun a sa place et comprendre quelqu’un « selon ses propres termes » est probablement plus approprié pour les personnes qui agissent comme médiateur.
Le dernier exemple donné par Jull est celui où elle agit comme animatrice de groupe. À la fin de cette étude de cas, Jull confie : « Je commence à croire que le fait d’ajouter de la compassion dans des systèmes comme ceux-ci produit souvent de meilleurs résultats… ». Ce à quoi répond un participant à la facilitation : « Lorsqu’une personne croit qu’elle reçoit de la compassion d’une autre personne, le monde se transforme soudainement en un endroit plus sûr… » (page 115.) [traduction] Cet échange me semble une belle façon de résumer la portion narrative de Jull.
Jull conclut son livre avec un chapitre sur les incidences sur la recherche et sur l’analyse des différends. Sa conclusion présente un résumé et une dernière réflexion sur les exemples du livre et sur la façon dont l’approche par la connaissance a aidé des gens, dont elle-même, dans leur vécu des différends. En italique, aux pages 154 et 155, elle ajoute un récit personnel adorable sur un différend entre elle-même et sa fille, dans lequel elle décrit une altercation concernant le coucher, alors qu’elle tente elle-même d’achever l’écriture de son livre. J’ai trouvé ce récit attachant, m’étant moi-même retrouvée dans une situation semblable au moment où je m’assoyais à ma table de cuisine pour rédiger cette critique.
Comme je l’ai mentionné, je ne savais rien de l’approche par la connaissance avant de lire ce livre, bien que j’aie été formée à divers autres styles et modèles de médiation. Cette analyse approfondie et théorique d’une approche des différends est plus appropriée pour un médiateur chevronné ou un étudiant chevronné du règlement des différends. Comme le décrit Jull aux pages 140 et 141, dans l’enseignement des différends et de la communication, l’explication sur la manière d’aborder une question est très simple, mais elle « manque de complexité, de précision, de contexte et d’intériorité » (page 140). Ce livre, comme l’écrit Jull dans sa conclusion, porte davantage sur une « méthode de découverte » approfondie (page 141) que sur une « liste de techniques » (page 141). Ainsi, pour le nouveau médiateur, je suggère de mettre cette lecture de côté en attendant de bien maîtriser les bases, et j’encourage le médiateur chevronné à lire cet ouvrage pour l’intéressante mise en œuvre de l’approche par la connaissance et de l’aspect théorique de l’examen des différends.

Demi Peters, Méd.B
Demi Peters est une médiatrice brevetée et une éducatrice en résolution de conflits de Saskatoon (Saskatchewan) et est membre de l’ADR Institute of Saskatchewan.