Techniques de clôture efficaces pour médiateurs
Par Sheldon J. Stark, médiateur et arbitre
Nous sommes souvent choisis comme médiateurs parce que nous avons les compétences nécessaires pour aider les parties à parvenir à une résolution satisfaisante. Un outil commun est la proposition du médiateur, laquelle sera abordée dans un autre article à publier. Le présent article traite de cinq techniques de rechange qui vous permettront d’aider les parties à aplanir leurs différences.
« Accepteriez-vous s’ils veulent payer, payeriez-vous s’ils veulent accepter? »
Cette technique est efficace lorsque les négociations ont ralenti et progressent difficilement, rendant la situation plus pénible pour tous les participants. L’utilisation de la technique peut commencer dans l’une ou l’autre des salles. Dans la salle du demandeur, la question hypothétique à poser est la suivante : y a-t-il un montant supérieur à celui de la dernière proposition de la défense – un montant suggéré par le médiateur – qui serait acceptable? Dans la salle du défendeur, la question est de savoir si un montant particulier, inférieur à celui mentionné dans la dernière demande du demandeur, conviendrait si le demandeur l’acceptait. Le montant suggéré par le médiateur peut nécessiter la tenue d’une négociation. Par exemple, si le demandeur a demandé un montant de 275 000 $ et que le défendeur a offert 180 000 $, le médiateur pourrait poser la question suivante : « Si je pouvais les amener à payer 210 000 $, accepteriez-vous? Je n’ai aucun pouvoir sur cela, mais je crois qu’ils pourraient être persuadés si cela permettait de régler le dossier. » La réponse est souvent « oui »; cependant, ce pourrait être « Non, mais un montant de 225 000 $ conviendrait ». Une fois qu’un accord est intervenu sur le montant à communiquer – et seulement avec un accord confidentiel d’acceptation en main – le médiateur approche la défense et lui demande si elle paierait ce montant si le demandeur accepte. Si non, paierait-elle un autre montant? Je ne révèle pas que j’ai l’argent, simplement que je crois fermement pouvoir l’obtenir. Il n’y a aucun inconvénient ou désavantage pour les négociateurs parce que les montants sont communiqués par le médiateur et non par l’autre partie. Si le « montant hypothétique » ne permet pas de résoudre le dossier, les parties sont protégées. Dans l’exemple ci-dessus, le demandeur n’a jamais demandé un montant inférieur à 275 000 $, et le défendeur n’a jamais proposé un montant supérieur à 180 000 $. En utilisant des montants hypothétiques, le médiateur communique un montant que les deux parties peuvent accepter.
La technique des trois montants de Lee Jacobson
C’est lorsque les parties refusent de changer d’avis, mais que le médiateur croit qu’il y a beaucoup de latitude que cette technique est la plus efficace. On demande à chaque partie de soumettre simultanément trois montants au médiateur, sur une base strictement confidentielle, et on leur explique les règles. Pour le demandeur, le premier montant doit être inférieur à celui de la dernière offre communiquée. Le montant constituerait un règlement « acceptable », même si ça ne casse rien. Le deuxième montant doit être inférieur au premier et, s’il est payé, être acceptable, mais « décevant ». Le troisième montant, qui doit être inférieur aux deux premiers, serait qualifié de « montant crève-coeur ». Oui, ce montant permettrait de régler le dossier, mais le demandeur serait insatisfait et très déçu. La défense soumet trois montants supérieurs à celui communiqué dans la dernière offre en fonction des trois mêmes critères : un règlement tout juste acceptable, un règlement décevant et un règlement crève-coeur.
Le médiateur examine ensuite les six montants sur une base confidentielle. La technique fonctionne seulement avec les montants crève-coeur. Si le montant crève-cœur soumis par chaque partie est le même, le différend est réglé avec le montant crève-coeur. Si les montants crève-cœurs se chevauchent – le défendeur offrant un montant plus élevé que celui demandé par le demandeur – le dossier se règle au point milieu. Si l’écart entre les montants est égal ou inférieur à 10 %, le dossier se règle au point milieu. Le pourcentage de 10 % est calculé en additionnant les deux montants crève-cœurs et en multipliant la somme par 0,1. Par exemple, si le montant crève-cœur du demandeur est de 100 000 $ et que celui du défendeur est de 90 000 $, la différence est de 10 000 $.
- 100 000 $ + 90 000 $ = 190 000 $
- 0,1 x 190 000 $ = 19 000 $
La différence est bien inférieure à 10 %. Par conséquent, le dossier se règle au point milieu, soit 95 000 $. Si l’écart entre les montants est égal ou inférieur à 20 %, nous poursuivons le travail : 1) en reprenant la négociation; 2) en essayant de négocier une fourchette de montants; 3) en communiquant les montants confidentiels, avec l’autorisation des parties, et en examinant s’il est possible d’arriver à un montant qui serait acceptable; 4) en offrant une proposition du médiateur. Si l’écart est supérieur à 20 %, la médiation est terminée. Certains médiateurs utilisent un écart de 25 %. J’ai utilisé cette technique des dizaines de fois. Elle est magique et n’a échoué que deux fois!
La technique de la « valeur de pouvoir tourner la page » d’Andy Little
Pendant la réunion préliminaire de prise de contact que je tiens avec chaque partie et chaque conseiller en l’absence de l’autre partie au début d’une médiation, je demande une liste de leurs buts et objectifs. « Qu’espérez-vous obtenir du processus de médiation aujourd’hui », leur demandais-je. Les parties répondent « une compensation juste », « justice », « des excuses » ou une variante de chacune de ces réponses.
Si le fait de tourner la page ne figure pas sur la liste, je demande si je peux l’ajouter. Je leur demande si c’est important pour eux de mettre ce différend dans le rétroviseur et d’aller de l’avant d’une manière positive et constructive. Rarement une partie a-t-elle dit non.
Rendons-nous rapidement à la fin de la médiation. S’il existe un écart entre la dernière demande et la contre-offre, je rappelle à la partie qu’elle a dit, au début de la médiation, que le fait de tourner la page avait de l’importance. « L’écart est de 15 000 $. Je ne crois pas que je peux leur faire payer un dollar de plus. Ils me disent que c’est le montant limite de leur mandat et rien ne me porte à croire le contraire. Je sais que ce n’est pas ce que vous espériez. Vous me l’avez bien fait comprendre. Mais leur dernière offre, si elle est acceptée, permet bien de tourner la page, et cela a de la valeur. Personne d’autre ne peut vous dire quelle est la valeur de tourner la page. Pas moi. Pas votre avocat. Pas même votre conjoint(e) ou votre meilleur(e) ami(e). Vous seul connaissez la valeur qu’a le fait de tourner la page pour vous. Quelle est la valeur de tourner la page? Est-ce un montant de 15 000 $? Si c’est le cas, un règlement à ce montant vous procurerait tous les avantages associés au fait de tourner la page. »
Les parties assument à parts égales les honoraires du médiateur
Une médiation peut coûter cher même lorsque les parties se partagent les frais. Dans un conflit de travail, l’employeur accepte parfois de payer la totalité des honoraires du médiateur, ce qui est souvent juste assez pour combler l’écart entre la conclusion ou la non-conclusion d’un accord. Le paiement de la totalité des honoraires fonctionne, car les honoraires du médiateur sont souvent imputés à un budget de gestion des litiges et non à un budget de fonctionnement. Les décideurs et les critères de règlement diffèrent pour chacun. Les représentants de la direction s’y attendent souvent. Ils ne sont pas surpris lorsque le demandeur le demande. Dans un litige commercial, une demande de paiement de la totalité des honoraires n’est pas toujours bien reçue.
Dons de charité
Parfois, les parties se rapprochent uniquement pour attaquer, étant réticentes à payer ou à accepter même un dollar de plus. Le médiateur Orit Asnin, en Israël, pense qu’il est possible de convaincre les parties de conclure un accord en leur proposant de faire un don à un organisme de bienfaisance pour combler l’écart.
Conclusion
Les techniques de clôture sont bien utiles à la fin d’une journée de négociation longue et difficile, lorsque tous les participants sont fatigués et bougons. Plus le nombre de techniques offertes est grand, plus la probabilité de trouver une voie vers une résolution acceptable est grande.
Sheldon J. Stark fournit des services de résolution des différends depuis le milieu des années 1980. M. Stark offre notamment des services de médiation, d’arbitrage, d’évaluation du dossier et d’enquêtes par un tiers neutre.