L’art de faire une proposition de médiateur
Par Sheldon J. Stark, médiateur et arbitre
Une proposition de médiateur consiste généralement à proposer, à la fin du processus de médiation, un montant forfaitaire à prendre ou à laisser que les deux parties seront tentées d’accepter. Si les deux parties acceptent, le litige est réglé pour le montant proposé. Si une partie accepte et l’autre refuse, la partie qui refuse n’est pas informée de l’acceptation de la proposition par l’autre partie. Le présent article passe en revue un échantillon d’approches adoptées par des médiateurs expérimentés pour faire ce genre de propositions.
Définition du terme « proposition de médiateur »
Une proposition de médiateur consiste généralement à proposer, à la fin du processus de médiation, un montant forfaitaire à prendre ou à laisser que les deux parties seront tentées d’accepter. Si les deux parties acceptent, le litige est réglé pour le montant proposé. Si une partie accepte et l’autre refuse, la partie qui refuse n’est pas informée de l’acceptation de la proposition par l’autre partie.
1er exemple : Proposition de médiateur dans le style texan
Eric Galton, médiateur au Texas et ancien président de l’International Academy of Mediators, utilise les propositions de médiateur avec parcimonie et seulement lorsqu’il est convaincu que c’est la seule et dernière solution pour les parties. Les parties doivent accepter de se plier à la procédure. Eric attend quelques jours après le processus de médiation avant de faire une proposition de médiateur pour permettre aux parties de réfléchir à ce qu’elles ont appris à la table de négociation. Il soumet ensuite à chaque partie une proposition écrite confidentielle et argumentée. Les parties ont une semaine pour y répondre. Cette période d’attente permet d’éviter qu’une partie se plaigne d’avoir été contrainte de régler le litige pour un montant inacceptable. Le montant n’est pas déterminé de manière arbitraire. Il est le résultat d’une réflexion approfondie qui prend en compte les risques, les coûts, les défis, les forces et les faiblesses du cas de litige. Chaque partie reçoit une lettre distincte, parce que les raisons, les risques et l’analyse du médiateur diffèrent pour chacune d’elles. Les destinataires sont les décideurs. La lettre détaille les titres et l’expérience d’Eric pour que les parties puissent se fier à ses compétences, à son expérience et à sa crédibilité lorsqu’ils prendront connaissance de la lettre de proposition de médiateur. L’objectif d’Eric est de déterminer un montant que chaque parti devra s’efforcer d’accepter.
2e exemple : Le médiateur magique du Michigan
Ed Pappas, ancien président du barreau de l’État du Michigan, coprésident de l’ADR Section Skills Action Team et associé principal chez Dickinson Wright, intervient dans des cas complexes dont la résolution requiert souvent une seconde journée de médiation. Ed laisse le processus de médiation se dérouler normalement. Il n’utilise l’approche de la proposition du médiateur que dans un faible pourcentage de cas. Ed attend que les avocats en fassent la demande. Il rejette leurs demandes tant qu’il n’est pas certain que les parties ont bien négocié et qu’elles sont allées jusqu’au bout de ce qu’elles pouvaient faire. Il demande d’abord le consentement des parties. Le cas échéant, Ed organise une réunion avec les avocats sans la présence des parties. Il leur demande de proposer un montant qu’ils seraient prêts à recommander à leurs clients. S’il y a consensus, Ed présente la proposition verbalement aux deux parties, ensemble et en même temps. En général, les parties prennent une décision immédiatement et quittent la table de négociation avec un accord écrit. Il acceptera toutefois de donner plus de temps aux parties pour prendre cette décision importante si la demande lui en est faite.
3e exemple : Ma propre méthode
Dans ma pratique, j’attends moi aussi qu’une demande me soit adressée, mais je ne donne mon accord qu’après avoir essayé d’autres approches de clôture de médiation. Je n’aurais pas assez d’informations pour proposer un montant avec quelque chance de succès si la demande était faite trop tôt. Les avocats en sont conscients. Le moment venu, j’examine l’éventail des montants possibles avec chaque partie séparément. Je réunis ensuite tout le monde pour présenter ma démarche de fixation du montant. J’explique que le montant sera inférieur à la dernière offre proposée par le plaignant, mais supérieur à la dernière offre du défendeur. Le montant de ma proposition ne sera pas une moyenne des deux. Je leur promets plutôt d’évaluer les forces et les faiblesses de leurs demandes et de leurs défenses, de prendre en compte les honoraires et les coûts, d’évaluer l’ampleur des risques auxquels chacun est exposé et de proposer un montant que chaque partie pourra difficilement rejeter. S’ils sont intéressés, je leur explique mon raisonnement. J’encourage chaque partie à prendre sa décision ce jour-là. Je leur accorde un délai supplémentaire si l’une ou l’autre des parties doit communiquer avec des décideurs qui ne sont pas présents à la table de négociation.
4e exemple : Une approche unique
Orit Asnin est une médiatrice basée en Israël qui intervient dans des litiges commerciaux complexes dans un contexte multiculturel et conflictuel, aussi bien en Israël qu’avec des parties internationales. Elle part du principe que le processus de médiation appartient aux parties et à leurs représentants, et non au médiateur. Par conséquent, tous les intervenants doivent donner leur consentement, qu’il s’agisse des clients ou des parties au litige. Elle pense que la probabilité que sa proposition soit acceptée est plus grande si tout le monde est tenu de participer au processus.
Elle accepte généralement de recourir à une proposition de médiateur lorsque certains facteurs sont réunis.
- Tout le monde est d’accord.
- Le processus de négociation est au point mort.
- Elle a une bonne idée de la fourchette de montants envisageable.
- Les parties sont vraiment « mevushalim » (suffisamment cuites en hébreu), elles sont prêtes à recourir à cette ultime solution.
À la lumière de ce qu’elle a appris au cours de la médiation, elle ne restreint pas nécessairement sa proposition à un règlement en argent. Elle peut comprendre des solutions qui ont déjà fait l’objet de discussions, telles que des suggestions sur la manière dont les parties pourraient collaborer dans le cadre d’éventuels accords commerciaux ou d’entreprises conjointes. Sa proposition peut aussi comprendre des excuses ou des remerciements de la part d’une partie, si c’est jugé important.
Une proposition d’Orit Asnin peut prévoir l’attribution d’un petit pourcentage du montant de règlement à un organisme ou à une cause caritative, mais uniquement si les parties sont ouvertes à cette idée. Le cas échéant, elle intégrera cette contribution à sa proposition, laissant aux parties le soin de trouver une cause qui leur convienne à toutes les deux. Mme Asnin estime que les contributions caritatives apportent une valeur ajoutée au processus de médiation. Les parties éprouvent une plus grande satisfaction par rapport au processus et sont fières de contribuer à une cause plus importante qu’elles-mêmes.
Puis elle réunit tout le monde dans une même pièce pour leur faire part de sa proposition. Elle demande aux participants d’être respectueux et de ne pas réagir, même s’ils pensent qu’elle les a tout à fait « mal compris ». Elle leur demande de ne pas réagir avant le retour à la table de négociation. Avec humour, elle invite les participants à répondre à la proposition, pourvu qu’ils aient une attitude positive. Paraphrasant une célèbre boutade d’Henry Ford, elle fait remarquer que c’est comme acheter une voiture de n’importe quelle couleur pourvu qu’elle soit noire. Elle peut ou non fournir une justification à sa proposition. Dans certains cas, il est judicieux et utile de formuler une justification pour parvenir à une décision. Dans d’autres cas, il n’est pas nécessaire de justifier la décision et cela pourrait même s’avérer préjudiciable.
Elle invite les parties à répondre à sa proposition lorsque tout le monde est à la table de négociation. Si les parties ont besoin de plus de temps, elle demande aux avocats de leur recommander d’accepter le montant proposé.
Pourquoi les propositions de médiateurs fonctionnent-elles?
Bien qu’il existe différentes approches en matière de propositions de médiateur, le résultat pour les parties est souvent la résolution du litige. Les quatre médiateurs présentés dans cet article enregistrent tous des taux d’acceptation élevés. Pourquoi?
- Les parties font appel à des médiateurs en qui elles ont confiance et qu’elles respectent. C’est pourquoi les propositions de leurs médiateurs font l’objet d’un examen attentif.
- Les propositions de médiateur permettent aux décideurs de se protéger lorsqu’une solution risque de ne pas plaire à d’autres parties prenantes, à des associés ou à des proches. (« Ce n’est pas ma décision. C’est la décision recommandée par le médiateur. »)
- Si les participants se montrent attentifs, la médiation est une expérience d’apprentissage enrichissante. Un montant qui serait probablement rejeté le matin devient acceptable l’après-midi.
- Les parties apprécient de pouvoir tester leurs demandes et leurs défenses auprès d’une personne neutre, objective et digne de confiance.
- La médiation est l’occasion d’exprimer ses sentiments, ses griefs et ses émotions. Les gens se sentent écoutés et respectés. À l’issue d’un processus de médiation bien orchestré, ils sont mieux à même de prendre du recul et de porter un jugement réfléchi et professionnel sur la résolution du problème.
Les propositions de médiateur sont un moyen efficace de clôturer un processus de médiation.
Sheldon J. Stark fournit des services de PRD depuis le milieu des années 1980. Il offre des services de médiation, d’arbitrage, d’évaluation de cas et d’enquête par un tiers neutre.